1836-1863 La formidable aventure
de la route n°27 :
problèmes en cascade en bas du bourg



mis en ligne le 26 juillet 2017    
La construction de la route a posé plusieurs problèmes dans le bas du bourg :
le tracé initialement prévu devait raboter le contre-fort de l'église, ce que curieusement personne n'avait auparavant remarqué. Un nouveau tracé en contre-bas fut accepté, mais personne n'avait pensé aux tonnes de rocher à extraire à la main pour tracer la route ni à la fragilisation de la tour dont les fondations se trouveraient largement au dessus de la route !
Ces modifications ont bien sûr des coûts et la Municipalité sui avait déjà du mal à payer les terrains, se débat avec des budgets trop serrés.
Histoires de Liorac : les temps modernes
1800-1940 Démographie et mortalité infantile à Liorac.
1811-1911 Les pavés de grès de la forêt de Liorac.
Les carriers de Liorac.
1824 De la fausse monnaie circule à Liorac.
1834 le maire mène l'enquête.
1835, les réponses du maire, F. Beneys, à l'enquête
de Cyprien Brard donnent une image détaillée de Liorac :

          L'agriculture en 1835
          L'industrie en 1835
          Hygiène et santé publique en 1835
          Antiquités et Curiosités en 1835
1848-1849 Troubles à Liorac lors de l'élection du premier président de la République au "suffrage universel".
1846-1936 : Evolution des métiers au bourg de Liorac.
1852, l'agriculture à Liorac (enquête statistique)
1853-1854 : de quoi mourrait-on à Liorac ?
1854-1856 : soldats de Liorac pendant la guerre de Crimée
1836-1863 La formidable aventure de la route n°27
          le grand chambardement du bourg
          la naissance du haut Liorac
1876-1904 Construction de la maison d'école
1870-1871 : une guerre oubliée. Soldats de Liorac
1888 Une histoire de loup à Liorac.
1883 Les problèmes d'ordures à Liorac ne datent pas d'aujourd'hui !
1894 L'école de filles à Liorac devient école laïque.
1897-1965 Le bureau de poste de Liorac
1902 Le curé Tafforeau au moment des élections.
Vers 1905, c'était encore le temps des loups à Liorac.
1913 Les pilules roses pour personnes pâles.
1913-1969 L'adduction d'eau, un marathon de plus de 45 ans :
    Avant l'adduction d'eau, les puits.
    1913-1914, une première tentative
    D'une guerre à l'autre
    1958, l'eau arrive enfin dans le bourg !
  1959-1969,10 ans de plus pour alimenter tous les     hameaux
1917 Haro sur les nuisibles.
1914-1918 : la guerre
1919-1965 L'autobus de Liorac.
Vers 1920, la laiterie des Bigayres
1922 Le Monument aux morts de Liorac.
1925 L'électrification du bourg.
La terrible année 1944 en Dordogne
1939-1945 Deux "Morts pour la France" à Liorac.
1940-1945 Maurice Sarazac, Compagnon de la Libération.
22 juin 1944 : les troupes allemandes à Liorac.
1813-1975 : Médaillés de la Légion d'honneur à Liorac
1950-1965 La tournée de Denise.
Dans les années 50, l'épicerie Carbonnel.
Dans les années 50, la boulangerie Chassagne.
Dans les années 50-60, la fête à Liorac.
1961 Le tour de France passe pour la première fois à Liorac.

► Modification du tracé de la route : l'église l'a échappé belle !
En décembre 1860, le maire demande la rectification du tracé du chemin CG27 : en effet "le tracé prévu (en rose) attaquerait l'église, détruirait presqu'entièrement la place publique et arracherait les jolis ormeaux dont elle est ornée."

FIGURE 3

Le maire poursuit : "Le tracé en bleu ne causerait d'endommagement à rien et ne contrarierait que Melle de Lascoups qu'on priverait du meilleur de son fonds, mais elle n'élève aucune difficulté consentant que les terrains nécessaires soient imédiatement livrés au Sieur BOSC , l'entrepreneur. Une indemnité de 600F lui est allouée et les conseillers s'engagent à faire grever la commune d'un impôt suffisant. De plus, le Conseil Municipal s'engage à faire clôturer le jardin de Melle de Lascoups par une muraille en compensation du terrain que la construction du CG27 a nécessité en plus de celui qui était assigné dans le bourg."
Le conseil émet le vœu que le tracé en bleu soit adopté.
En décembre 1860, le préfet approuve le nouveau tracé et indique : "Comme les modifications en bleu n'augmentent pas beaucoup la rampe, elle ne coûtera pas plus cher à construire que la direction rose puisque l'entreprise Bosc a pris l'engagement de l'établir sans augmentation de prix et que d'autre part le Conseil Municipal livrera les terrains immédiatement. Il y a urgence à traiter cette affaire car les travaux de l'entreprise sont arrivés à ce point."

► C'était sans compter avec le sous-sol : presque 3000m3 de rocher non prévus à extraire à la main !
En avril 1861, l'entreprise Bosc demande que le rocher non prévu à son devis aux abords du bourg de Liorac lui soit payé, et indique que la pierre de taille du parapet du mur de soutènement à établir pour Liorac doit être changée car celle du pays est gélive et ne peut être employée. (Il s'agit ici du mur sur la partie gauche de la route en descendant vers la Louyre).
L'agent voyer d'arrondissement se livre à de savants calculs, visant à minimiser la somme supplémentaire à donner à l'entreprise : il reconnaît qu'il se trouve du rocher non prévu. Ce rocher étant à extraire à la main doit être payé à raison de 1F50 le m3 soit une somme de 4441F50. Mais ce rocher peut être utilisé, ce qui permet de faire des économies, pour la première couche de tous le empierrements restants à faire et employé ans les remplissages du mur de soutènement, et le rocher non utilisé servira de remblai. De plus le rocher non prévu facilite la suppression du mur de soutènement dans la partie basse et économise de la maçonnerie à pierre sèche. Quant au parapet du mur de soutènement, il ne peut être fait avec la pierre de Liorac prévue au devis car elle est effectivement gélive. Il faut donc la prendre au Roc de Rabier, commune de Lanquais, qui à cause du transport coûte beaucoup plus cher, mais la suppression du mur de soutènement dans la partie basse où il était peu élevé réduit la longueur du parapet à 80m.
Après tous ces calculs, la fin de la lettre signée Maleville résume : en considérant les augmentations et les diminutions, il reste 391,90 F à ajouter pour l'entreprise. On ne sait pas si l'entreprise Bosc a apprécié !


► Le passage le long de l'église s'écroule, il faut construire un mur de soutènement !
En août 1867, le maire explique les problèmes de passage le long de l'église : les terres de la place de Liorac s'éboulent fréquemment et rendent la circulation sur la place très difficile. De plus, les déblais de 1m à 1m50 de hauteur ont diminué la largeur de la place de Liorac et réduit cette largeur au droit de l'église à 3m-3m50, largeur qui se diminue encore chaque jour par les éboulements des talus . Pour remédier à cet état de choses très incommode au public qui se rend aux offices et le maire demande la construction d'un mur de de soutènement le long du CG27.
L'Agent Voyer de Bergerac approuve la proposition du maire qu'il juge très convenable : il faut "établir un mur sur le bord du fossé du CG27. De cette manière la place gagnera une partie de la largeur qu'elle a perdu, celle de la hauteur des déblais, les éboulements seront évités. Mr le maire demande de surmonter le mur d'une banquette, mais ce travail étant un embellissement, il incombe à la commune.
Les travaux que la ligne CG27 doit à la commune ne consistent donc qu'à la construction d'un mur sur 30 m de longueur, 1m30 de hauteur moyenne et 0;60m d'épaisseur, soit un volume de 23,40 m3. Considérant que l'approvisionnement des matériaux nécessaires peut être fait avec la prestation de Liorac de l'année 1868 et que la façon et les autres fournitures peuvent être évaluées à 140F, il est d'avis d'autoriser la construction de ce mur sans banquette et d'allouer pour ce travail un crédit de 140F à inscrire au budget de la ligne n°27 pour l'année 1868, les transports des matériaux devant être faits avec la prestation de Liorac de la même année."


► Réclamation d'Henri Pommeyret, menuisier
En novembre 1862, ce dernier écrit au Préfet, indiquant que les fondations de sa maison, se trouvent, après creusement de la route, élevées de 1m20 au dessus du fond du fossé, ce qui en "compromet gravement la solidité, d'autant plus que ce mur qui a 14 m d'élévation repose sur un bloc d'argile".

Le maire de Liorac, F. Beneys, écrit à son tour au préfet: "le terrain intermédiaire à partir de la base du fossé de la route jusqu'à la première pierre du fondement de la tour carrée de POMMEYRET, étant coupée en talus trop à plomb et à une hauteur de 1m20 est miné par les eaux et commence déjà à s'effondrer; nul doute si nous avons un hiver long et pluvieux qu'il ne finisse par céder entièrement et occasionner la démolition sinon totale du moins partielle du bâtiment dont la chute pourrait être funeste aux étrangers et même aux habitants du bourg qui passeraient alors dans cet endroit".
Malgré ces deux lettres, l'Agent Voyer de Bergerac répond qu'il n'y a aucun danger : "le CG27 ne fait qu'effleurer un angle de sa maison et qu'il n'y a aucun danger à craindre. Le sieur Pommeyret, pour fermer son héritage autant que pour garantir son habitation, vient de faire construire un mur de clôture sur alignement et il n'y a plus lieu de s'occuper de cette affaire. Il ne s'attend à aucune indemnité." Donc affaire classée.

On peut juste remarquer que le descriptif que fait Henri Pommeyret aussi bien que le maire de cette tour carrée évoque la tour en G217 en bas du bourg. Cependant sur le tracé de la route (Figure 3), une maison Pommeyret est indiquée un peu plus haut, à un endroit où il n'y en a pas sur le premier plan cadastral, (probablement une erreur sur le schéma de la route). De plus, en 1824, la maison en G217 appartenait aux LASCOUPS qui résidaient à St Georges de Monclard, ce qui laisse supposer qu'Henri Pommeyret l'aurait acquise entre 1824 et 1862.

► Largeur du chemin
La largeur du chemin vicinal de grande communication avait avait été fixée à 7 m plus deux fossés de 1m, soit au total 9m. On peut se demander quel était le trafic sur cette route après sa construction et si une telle largeur était réllement utile... En 1860, le Conseil Municipal souhaite qu'aucune autre maison soit dégradée, même si à certains endroits, il manque quelques centimètres à la largeur prévue. Il faut se rappeler que les frais d'achat de maisons et de terrains incombaient à la commune et que la charge financière avait déjà été considérable...
Délibération du 16 décembre 1860 : "le Conseil Municipal, pour un motif d'économie bien louable, désire ardemment que les maisons du Sieur Lavergne acquises l'une en entier et l'autre en partie(maison Marty) par la commune de Liorac soient les seules démolies et dégradées, et dut-il s'en manquer de quelques cms, que la route en face de la maison Teyssier eut sur une étendue d'environ 10 m, la largeur voulue par le réglement marquée sur le plan.
S'il était utile pour la régularité du chemin de détruire plus tard d'autres maisons, la commune serait mieux en position qu'à présent de supporter les sacrifices qu'elle serait contrainte de s'imposer afin d'en acquitter le prix."
Pour copie conforme signée Beneys.
Les entreprises et les travaux

Le Chemin de Grande Communication N°27 entre Bergerac et Ste Alvère est d'une longueur de 29,323 km.
Deux entreprises furent en charge de le construire :
► L'entreprise BOSC commence aux travaux terminés à Laferrière, traverse St Sauveur, Lamonzie Montastruc, et Liorac et finit au moulin de Carrieux.
Cette entreprise assurait donc les travaux sur la commune de Liorac.
Elle a été donnée sur soumission moyennant la somme de 49 483,75F.
Les travaux exécutés par l'entreprise au 30 juin 1858 s'élèvaient à la somme de 6 374,73F, ils ont été soldés (à peu près!) par les crédits de 1857 (5000F de subventions départementales et 770F de prestation).
Pour terminer avec l'entreprise Bosc il faut donc encore 43 713F. mais les crédits semblent bien insuffisants :
les crédits 1858 qu'on emploie sont de 5600F de subvention et 1162F de prestation, soit 6762F.
► L'entreprise DURAND située sur le territoire de St Marcel et Ste Foy de Longas est assez avancée.

En 1858, 15,849 km sont terminés et entretenus régulièrement. Il reste donc 13,474 km à achever. Pour rendre carrossable en toute saison comme le désirent les populations il faut :
1° entreprise Bosc -------------------------------------43 713F
2° entreprise Durand-----------------------------------11 152F
3° lacune de 850 m en face de St Félix ------------- 2 000F
(un propriétaire rechigne à vendre son terrain sans indemnité préalable)
-----------------------------------------------------Total 56 865F
Il manque encore beaucoup d'argent pour solder les travaux et il faudra encore plusieurs années pour tout régler.


FIGURE 4
La fin de l'histoire : Le Conseil Général dans sa session de 1863 (ICI sur Gallica) évoque l'énorme effort porté depuis 1857 sur les chemins vicinaux et en particulier sur les chemins de Grande Communication : 28 CGC sont terminés.
Le CGCn°27 fait partie des chemins livrés à la circulation sur la totalité de leur parcours, mais sur lesquels il reste encore quelques travaux à compléter pour la réception définitive.
Ce fut donc une sacrée aventure : depuis 1836, date de la première décision de construire ce Chemin de Grande Communication, les études, les plans, les négociations pour acheter les terrains, les maisons tronquées ou démolies, les efforts financiers de la commune qui dut voter plusieurs fois des centimes additionnels, jusqu'en 1863 date où les travaux furent pratiquement terminés.
On peut se demander si les habitants on tiré un avantage conséquent de la réalisation de cette route. Cependant, une modification essentielle liée à la route est l'extension du bourg et la construction du Haut Liorac ... en particulier de l'école.

La naissance du Haut Liorac

@ Marie-France Castang-Coutou - postmaster*liorac.info (remplacer l'étoile par @)