Où étaient enterrés nos ancêtres ? La réponse semble simple, au cimetière bien sûr ! mais pas toujours...
Voici quelques informations sur les lieux d'inhumation et les rites funéraires en usage à Liorac au cours du temps.
RITUELS ET TRADITIONS AUTOUR DE LA MORT
Il y a déjà longtemps, Liorac était un village peuplé : entre 600 et 700 habitants jusqu'en 1900 .
Les familles regroupaient souvent plusieurs générations sous le même toit : parents, enfants ,
rarement les grands parents. En effet autrefois la vieillesse commençait très tôt, vers la quarantaine, les habitants usés par le travail qu'ils assumaient cependant jusqu'à la fin
et les femmes épuisées par les grossesses rapprochées. Ainsi au moment de leur mariage, vers 25 ans, souvent les époux avaient déjà perdu un de leurs parents
et n'avaient jamais connu leurs grands parents. Les gens ne savaient pas leur âge exact on était "vieux" ou "très vieux" et sur les actes de décès, le curé écrivait "âgé d'environ...",
et l'âge restait à la discrétion du curé qui rédigeait l'acte !
La mort était donc un évènement fréquent dans les familles et au moins un décès frappait presque tous les ans chaque foyer : un parent ou un enfant.
La mortalité infantile était en effet énorme, due aux complications pendant l'accouchement, à la malnutrition (après le sevrage obligé, conséquence d'une nouvelle grossesse), ou à une
maladie infectieuse (il n'y avait que les remèdes traditionnels pour essayer de soigner, et rarement un médecin).
Tout ça pour dire que les décès étaient fréquents dans le village et les rites funéraires ont été différents suivant les époques.
Les habitants étaient avertis d'une mort imminente par le passage de Mr le curé portant l'Extrême Onction.
Il traversait le village, précédé d'un enfant de choeur portant une croix et une clochette : tout le monde s'arrêtait et se signait à son passage.
◊ Le mourant avait donc régularisé sa situation spirituelle.
◊ Ses affaires matérielles étaient en ordre souvent depuis longtemps : il était allé chez le notaire ou le notaire était venu chez lui
lorqu'il était au lit malade pour recueillir ses dernières volontés et rédiger son testament. Tous, même les plus pauvres, faisaient leur testament. Invariablement le testament commençait par une formule habituelle :
"Sachant qu'il n'est rien de plus certain que la mort, ni de plus incertain que l'heure d'icelle". Ainsi il valait mieux être prêt !
Le testament avait pour but de répartir ses biens mais aussi et surtout de donner des instructions pour son enterrement : lieu de l'enterrement, nombre de prêtres pour officier lors de la cérémonie,
nombre et fréquence des messes à dire pour le repos de son âme.
◊ Parents et amis entouraient celui qui allait "passer" récitant des prières autour de son lit. Le cierge pascal était allumé.
◊ La sonnerie du glas annonçait le décès : le nombre de coups indiquait s'il s'agissait d'un homme, d'une femme ou d'un enfant.
Les habitants comptaient les coups pour identifier le mort, car souvent plusieurs habitants étaient en fin de vie au même moment.
◊ Après le décès, le défunt était préparé, habillé. Dans la maison on arrêtait l'horloge, on voilait les miroirs. Un récipient d'eau bénite était disposé près du lit avec une branche de rameau.
La "visite" des voisins et amis commençait, chacun traçait la croix sur le défunt avec le rameau trempé dans l'eau bénite .
◊ Le soir, autour du lit, c'était la veillée : prières et histoires alternaient et bien sûr victuailles et boissons étaient offertes aux participants.
Autrefois, il n'y avait pas de cercueil : le défunt était enveloppé dans un "linceuil", drap prévu depuis longtemps et qui faisait toujours partie de la dot des filles lors de leur mariage.
Pour l'amener jusqu'à son lieu d'inhumation, il était provisoirement placé dans un cercueil qui servait pour tous dans le village.
Le transport se faisait sur un char à boeufs et les voisins et amis le portaient dans l'église.
L'INHUMATION
Depuis l'avénement du Christianisme en Europe, la doctrine de l'Eglise demandait d’ensevelir les corps des fidèles et non pas d'avoir recours à la crémation comme c'était le cas
pour les civilisations paiennes (
voir l'urne cinéraire trouvée sur la commune).
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l'inhumation dans l'église : elle fut interdite en 1776 pour des raisons évidentes d'insalubrité.
Le sujet a déjà été abordé dans ce site
ICI.
Néanmoins selon les registres paroissiaux,
entre 1668 et 1778, 204 personnes ont été enterrées dans l'église de Liorac. Parmi elles 48 enfants de moins de 7 ans.
Pendant la même période, 3734 décès ont été enregistrés à Liorac. Les inhumations dans l'église ne concernaient donc qu'environ 5% des décès.
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l'inhumation dans le cimetière :
les défunts étaient donc en majorité enterrés dans le cimetière. Mais le cimetière était une terre bénie où l'on ne pouvait pas enterrer n'importe qui ! En étaient exclus
les enfants non baptisés (pour éviter cela, la matrone accoucheuse était choisie par le curé, non pour savoir mettre au monde un enfant mais pour sa capacité à baptiser un bébé en cas d'urgence),
les concubins notoires, les suicidés et bien sûr les protestants. Souvent dans le Sud-Ouest les protestants étaient inhumés dans leur propriété, dans des cimetières familiaux.
Pour les autres, je ne sais pas.
A Liorac, on trouve des tombes isolées dans certaines propriétés, par exemple deux sarcophages à la Roque, un cimetière sans doute très ancien au Vieux Liorac... et sans doute bien d'autres.
Mais l'absence d'inscription sur ces sépultures ne permet pas de les identifier ni surtout de les dater. Un travail pour un archéologue ....
En 1737, le cimetière de Liorac fut frappé d'interdit :
L’interdit proféré par les autorités religieuses frappait le cimetière en cas de faute grave commise par les villageois :
cela concernait en général l'absence de murs de clôture autour du cimetière ce qui laissait les animaux, volailles et cochons venir y rechercher leur pitance.
Cela ne dérangeait apparemment pas les paroissiens qui souvent même y venaient couper de l'herbe pour leurs lapins.
Ainsi pendant l'été 1737, l'interdit fut jeté sur le cimetière de Liorac et le curé Guillaume POURQUERY écrivit pour 6 défunts :
"Je lui ai fait l'office des morts et l'ay accompagné jusqu'à la porte de l'église, n'ayant pu l'accompagner plus loin à cause de l'interdit jeté sur le cimetière".
L'interdit sur le cimetière empêchait les inhumations sur place, mais aussi la grand'messe, les cloches, les mariages.
Mais il fallait bien enterrer les morts et parfois les gens passaient outre discrètement et transgressaient
l'interdit en enterrant dans le cimetière ou dans un village proche.
L'interdit fut levé, mais pendant les années qui suivirent l'ordre ne fut pas rétabli dans le cimetière comme on peut le constater par la description de 1804 qui suit...