La division Brehmer :
exécutions , déportations, viols, pillages et incendies en Périgord

page mise en ligne le 18 février 2024      

Face aux attaques et sabotages répétés, Berlin décide de renforcer ses troupes en Périgord et envoie une division spéciale pour éradiquer la Résistance et terroriser les populations. : c'est la division Brehmer. Cette division est intervenue dans plus de 20% des communes de Dordogne, a causé la mort de centaines d'otages, maquisards et civils, a été responsable de centaines de déportations, a pillé et incendié des centaines de maisons, parfois des villages entiers.
LA DIVISION "B" COMMANDÉE PAR LE GÉNÉRAL W. BREHMER
vient occuper la Dordogne et entreprend une opération de "nettoyage" de grande envergure pour éliminer la Résistance. C'est une unité de 6000 à 8000 hommes destinée à semer la terreur parmi les populations de Dordogne : la traque aux Résistants, aux Juifs et aux Communistes est ouverte.
► La division Brehmer est accompagnée par la Brigade nord-africaine , une unité de collaboration paramilitaire d'environ 300 hommes, opérant pour le compte de l'Allemagne nazie : créée au début de l'année 44 par Henri Lafont, responsable français de la Gestapo et composée de musulmans recrutés parmi la communauté nord-africaine présente en France, et comprenant plusieurs sous-officiers français. Pendant sa présence en Dordogne, cette brigade nord-africaine s’est illustrée par ses innombrables exactions et massacres.
► La division Brehmer est également secondée par un Bataillon de Géorgiens . Des Géorgiens enrôlés dans l’Armée rouge combattaient l’armée allemande, souvent en première ligne et les nombreux prisonniers furent envoyés dans les camps en Allemagne. Pour en sortir, et survivre, ils furent nombreux à rejoindre l’Ostlegionen allemande : cinq bataillons composés de soldats géorgiens sont affectés au territoire français par l'État-major allemand, mais plusieurs centaines d'hommes déserteront et rejoindront les maquis français.

L'ordonnance SPERRLE pour "la lutte contre les bandes, signée le 2 février 1944 par Berlin et reprise le 12 par le gouvernement de Vichy, légitime toutes les formes de violences. Les troupes nazies n'ont plus de sanctions à craindre en cas de débordement. " L'interdiction de faire des prisonniers dans la guerre contre les résistants couvre les exécutions, l'incendie des maisons et l'élargissement des mesures de répression à la population civile" (citation de l'espace mémoire, Rouffignac).
Les troupes nazies, bénéficiant de renseignements malheureusement fournies par des délateurs et par l’administration de Vichy, traquaient les maquisards et massacraient des civils en représailles, mais aussi suivaient une politique génocidaire à l’encontre des nombreux Juifs réfugiés dans le département.
Voici une carte schématique de la Dordogne où j'ai indiqué par des points rouges les interventions sanglantes de la division Brehmer : la liste est longue et très probablement incomplète.

L'opération de la division Brehmer a commencé le 26 mars 1944 par des interventions à l'ouest du département : la forêt de la Double était une région propice pour abriter de nombreux maquis et cacher des Juifs qui avaient fui l'Alsace devenue allemande. L'Etat major allemand s'installe à Ribérac et des unités mobiles sillonnent la région pour débusquer les maquisards, les réfractaires au STO et les Juifs. Ils interviennent ainsi dans beaucoup de villages laissant derrière eux une trainée de victimes :
Il est bien sûr possible de relever les noms des victimes sur les monuments aux morts des villages , mais plusieurs auteurs référencés plus bas ont déjà fait une recherche minutieuse et établi les biographies des victimes :
Guy Penaud a réalisé une liste exhaustive des personnes fusillées spécifiquement durant l'opération Brehmer. Bernard Reviriego a établi de manière plus générale plus de 1100 biographies de fusillés et morts au combat en Dordogne, résistants ou civils, Juifs ou non. Enfin, le "Maitron des Fusillés" fournit les fiches consultables en ligne des individus fusillés pendant cette triste période. Aussi pour ne pas plagier tous ces travaux nous nous contenterons d'indiquer en suivant la chronologie les noms ou au moins le nombre des victimes par village (chiffre entre parenthèses) pour souligner l'étendue des crimes de cette division Brehmer .
Le 26 mars 1944
A Ribérac, un Monument érigé deux ans après cette sombre journée indique les noms des fusillés de chaque commune du canton :
LE CANTON DE RIBERAC AUX VICTIMES DE LA BARBARIE ALLEMANDE.
Allemans (2 victimes) : JEAN DUPEYRAT, un luthier de Ribérac, fut emmené dans une ferme tenue par ses métayers qui avaient hébergé des réfractaires au STO. Il fut fusillé avec son métayer ANTOINE LAFAYE et la ferme incendiée.
Beauronne (1) : LÉO SÉBASTIEN (38 ans) fut fusillé. Une stèle fut élevée à sa mémoire à Beauronne. Son nom est inscrit sur les monuments aux Morts de Beauronne et de Douzillac.
La Jemaye(2) : Maurice DUMONTEIL, 47 ans, charcutier à Ribérac fut fusillé à La Jemaye le 26 mars ainsi que Clovis RASPIENGRAS 20 ans.
Saint André de Double (1) : Étienne CARDONA, républicain espagnol réfugié, y fut executé
Saint Laurent des Hommes (1) Jean Léon GOUNAUD, 77 ans, tué dans sa maison lors d'une perquisition.
Saint Martin de Ribérac (5) : Cinq personnes sont exécutées :
Gilbert DOSILE 45 ans, Gabriel RASPIENGAS 62 ans, garagistes à Ribérac, accusés d'avoir livré de l'essence au maquis, deux autres garagistes de Ribérac Nestor DUCHEZ et Charles DUPUY sont égalemant fusillés ainsi que Robert DUBOIS, instituteur et résistant.
Saint Médard de Mussidan (1) George WEIL 24 ans, réfugié de Strasbourg, victime civile d'origine juive.
Saint Michel de Double (3) : Lucien RIEUBLANC 46 ans et Roger RIEUBLANC 17 ans, un père et son fils, qui auraient eu des contacts avec le maquis, furent abattus, Marcel ECLANCHER 38 ans, fut battu, mutilé et fusillé, sa maison brûlée. Une stèle mentionne le nom de 5 victimes "fusillées par les allemands le 26 mars 1944". Il faut ajouter les noms de deux réfugiés de Strasbourg arrêtés le 26 mars : WITTENBERG Martin, 63 ans, de confession Juive et STRAUSS Eugène, 53 ans, résistant protestant, industriel aisé considéré à tort comme Juif. Arrêtés à Saint Michel de Double, ils furent transférés au fort du Hâ à Bordeaux et exécutés le 19 avril au camp de Souge (https://www.fusilles-souge.asso.fr)
Saint Sulpice de Roumagnac (5 victimes) :
Albert SAUMET 43 ans, Joseph BARRAT 20 ans, Roger BARRAT 30 ans, Marcel DURANTHON 23 ans, Henri GILAUDE 40 ans,sans doute supposés être des résistants furent exécutés à proximité de leur domicile. Les communes ont érigé des monuments en indiquant les circonstances et la date de ces meurtres.

Les 26 et 27 mars 1944, c'est le tour de Brantôme et de Ste Marie de Chignac
RÉFÉRENCES :
■ Guy Penaud, Les Crimes de la division Brehmer, La Lauze Ed.,2004, p 398-409.
■ Site Mémoire des Hommes, la seconde guerre mondiale ICI
■ Bernard Reviriego, Fusillés et morts au combat en Dordogne (1940 – 1944). Editions Secrets de Pays, 2023.
■ Le Dictionnaire des Fusillés, exécutés, abattus, Le Maitron des Fusillés ICI
■ AJPN Anonymes, Justes et persécutés durant la période nazie.ICI Ce site est "temporairement suspendu en raison des évènements internationaux et de la multiplication des actes antisémites en France."
■ Site dédié à la résistance, surtout du sud-ouest , la vie quotidienne sous l'occupation, les Alliés et la libération de la France pendant la seconde guerre mondiale ICI
■ Mémorial GenWeb ICI
26-27 MARS 1944, BRANTÔME ET STE MARIE DE CHIGNAC
ET LES VILLAGES PROCHES

@ Marie-France Castang-Coutou
Contact : postmaster*liorac.info (remplacer l'étoile par @)