DÉCRET IMPÉRIAL contenant les Actes de bienfaisance et d’indulgence à l’occasion du Mariage
de Sa Majesté Empereur et Roi, NAPOLÉON, EMPEREUR DES FRANÇAIS, ROI D’Italie, PROTECTEUR DE LA
CONFÉDÈRATION DU RHIN, MÉDIATEUR DE LA CONFÉDÉRATION SUISSE, voulant marquer l’époque de notre
mariage par des actes d’indulgence et de bienfaisance NOUS AVONS DÉCRÉTÉ ET DÉCRÉTONS ce qui suit :
TITRE IV Du mariage de six mille Militaires
5. Six mille militaires en retraite, ayant fait au moins une campagne, seront mariés le 22
avril prochain, avec des filles de leurs communes, auxquelles il sera accordé une dot de
douze cent francs pour Paris, de six cents francs dans le reste de l’Empire, à savoir :
soixante dans la ville de Paris , dix dans chacune des villes dont l’état est annexé au
présent décret (A), cinq dans chacune des villes dont l’état est annexé au présent décret
(tableau B), deux dans chacune des villes dont l’état est annexé au présent décret (tableau C) ,
un dans chacune des justices de paix de l’Empire.
6. Les militaires et les filles à marier seront choisis de la manière suivante, à savoir :
Pour la ville de Paris, par délibération du conseil général faisant fonction de conseil
municipal, approuvée par le préfet.
Pour les villes chefs-lieux de département, par délibération du conseil municipal, approuvée
par le préfet.
Pour les villes qui ne sont pas chefs-lieux de département, par délibération du conseil
municipal, approuvée par le sous-préfet.
Pour les justices de paix, par une commission composée de deux maires et de deux curés
désignés par le sous-préfet, et du juge de paix, qui présidera la commission et la
réunira dans son domicile.
7. Les communes qui ne seraient pas comprises dans les articles précédents, pourront sur
la délibération du conseil municipal, approuvée par le sous-préfet, marier un militaire
et une fille de la commune, en se conformant, pour le choix et pour la quotité de la dot,
aux dispositions ci-dessus.
Après réunion de la commission du canton de Lalinde, nommée par le sous préfet
(Lalinde était alors justice de paix),
il fut décidé
qu'un mariage serait célébré à Liorac à l'occasion de celui de l'Empereur entre :
Jean PUREY âgé de 34 ans, originaire de Douville, fils
de Jean Purey et de Jeanne Roque, métayers à Douville. Militaire retiré (il était "chasseur au 14eRgt d'Infanterie Légère), Jean PUREY était au moment de son mariage
cabaretier au bourg de Liorac.
Jeanne PATENCHON âgée de 33 ans et neuf mois, née à Langon en 1776, de Jean Patenchon et de Catherine Saint-Levin,
domiciliée dans la présente commune.
Elle était cuisinière.
La transcription de l'acte est disponible en cliquant sur le livre:
En bas du bourg de Liorac, il y a une maison avec une décoration de faîtage
représentant une petite statue de Napoléon. Cette représentation de l'Empereur est d'autant plus surprenante qu'elle est rare et sans doute unique en Dordogne.
Alors que beaucoup de départements de l'Empire possèdent de belles satues de bronze (comme celle de Cherbourg récemment remise en état par la SOCRA, celle de Montereau et bien sûr d'Ajaccio), on ne trouve pas de monument à la gloire de Napoléon en Dordogne.
L'érection d'un monument triomphal en son honneur avait bien été prévue à Périgueux (Conseil Municipal de Périgueux du 10 janvier 1806, BSHAP 1913, p 249), mais il ne fut jamais réalisé.
La petite statue de pierre de Liorac semble donc constituer une exception.
La tradition orale indique que cette maison fut autrefois une auberge. Cette statue indique peut être le cabaret de notre militaire?
LA SUITE DE L'HISTOIRE
Récemment des travaux sur la toiture de cette maison ont permis d'accéder à la statue, et de la descendre pour la nettoyer.
On peut maintenant y lire nettement une date
"1840", une inscription "napoléon" et on y distingue également une décoration en forme de croix, sans doute la croix de la légion d'Honneur.
Jean PUREY est mort en 1842 à Bordeaux. Il a donc pu faire réaliser et installer cette statue de son vivant. Comme on peut le voir sur la photo, la statue est de facture assez grossière, sans doute l'oeuvre d'un tailleur de pierres local.
Néanmoins, Jean Purey avait les moyens de payer une telle "réalisation" puisqu'il était devenu "homme d'affaires" chez Mr Daugeard, propriétaire du château de Tiregand, commune de Creysse.
Son épouse, Jeanne Patanchon, était cuisinière au château et ses enfants sont nés à Tiregand.
Mais que s'est-il passé en 1840 pour décider d'installer cette statue ?
Napoléon 1er a abdiqué en 1814, exilé à l'île d'Elbe, il revient au pouvoir pour les Cent-Jours.
Après la défaite de Waterloo en 1815, il abdique à nouveau en faveur de son fils, mais la royauté est rétablie avec Louis XVIII.
Napoléon 1er terminera sa vie à Sainte Hélène en 1821. Son fils "Napoléon II" meurt à son tour en 1832. Louis-Napoléon Bonaparte, neveu de l'empereur,
fils de son frère Louis, devient l'héritier présomptif de l'Empire mais ses deux tentatives de coup d'état, en octobre 1836 et août 1840, échouent.
La deuxième révolution française en juillet 1830 avait proclamé Louis-Philippe "roi des français" (et non plus roi de France).
Après bien des hésitations car il craignait des troubles à l'ordre public, Louis Philippe accepta de faire rapatrier les restes de Napoléon à Paris.
Ils furent transportés sur une frégate depuis Ste Hélène jusqu'à la rade de Cherbourg puis transférés sur un bateau plus petit pour remonter la Seine,
sur les berges de laquelle une foule rendit un dernier hommage à l'Empereur.
Enfin le 15 décembre 1840 ses cendres furent solennellement transférées aux Invalides.
L'année 1840 fut donc importante pour les bonapartistes à plus d'un titre : une tentative de coup d'état de l'héritier de l'Empire et le retour des cendres de l'Empereur.