Fin des Valleton à Garraube ...

L a fin du XIXe et le début du XXe
ont donc vu des jours heureux à Garraube
avec la célébration de plusieurs grands mariages,
mais la guerre de 14 y a vite apporté ses malheurs.

En 1920, le domaine est vendu, et après presque 300 ans,
la famille Valleton quitte définitivement le château de Garraube.


À la veille de la guerre de 14, les filles d'Albéric Valleton de Boissière et de Marie-Thérèse de Saint Martin de Veyran se sont mariées à Garraube : en 1899, Jeanne avec Henri de Gigou, en 1902 Geneviève avec Robert Joachim Mesnaud de Saint Paul, et en 1913, Marie Claire Louise Henriette avec Jean du Cor de Duprat. Leur fils Jean Edmond Robert Jacques, se mariera plus tard à Bergerac en 1927 avec Claire Magdeleine Escavaille, mais je ne sais rien de lui. Mais leur plus jeune fils, Jean, est militaire et va laisser la vie dans les combats de la guerre de 14-18, dans les tranchées devant Barleux dans la Somme.

Jean Valleton de Boissière, "Mort pour la France"
Son nom est inscrit avec celui de 20 autres soldats sur le Monument aux Morts de Liorac, mais il apparaît aussi sur celui de Cause de Clérans. Il avait fait ses études au Collège Saint-Joseph de Périgueux et on peut lire le texte suivant sur le Livre d'Or de cet établissement :
Un vrai soldat, un vrai héros. Un soldat de l'ancien temps, égaré dans le nôtre. Des sentiments d'ordre absolument supérieur, les plus français et les plus chrétiens. L'honneur même. Sorti du rang, conquérant ses grades, à la pointe de l'épée, sur le champ de bataille, comme autrefois, quand chacun portait dans sa giberne le bâton de maréchal de France. Tel fut Jean Valleton de Boissière de Garraube.
Jean de Boissière a fait chez nous cinq années d'études, de la cinquième à la première inclusivement (1905-1910). D'un bout à l'autre, ce fut la même allure sage, mesurée, toujours et pour tout au plus droit chemin. Rien de tapageur, rien d'emporté. Un de ces élèves dont, quand c'est fini, on ne se rappelle rien de fâcheux, dont on se rappelle, au contraire, tout digne de louange. C'était un bon fils", c'est l'expression si simple et si juste, dont usèrent ses excellents parents pour le louer et pour le pleurer. Nous y faisons écho en disant : "ce fut un bon élève". Un peu pressé par l'âge - né le 9 décembre 1893, il allait avoir 17 ans - il arrêta là ses classes et s'en fut, à l'Université catholique de Lille, suivre les cours de l'Ecole des hautes études commerciales.
Il en était à peine sorti, quand la guerre vint donner une nouvelle orientation à sa vie et consacrer sa mort. Il était déjà soldat, au 126e de ligne, à Brive. Nommé caporal au départ, il était sergent à la Marne, adjudant aux Eparges en avril 1915, sous-lieutenant le 31 mai suivant. Il se battait comme un lion et avait éminemment le sens des choses militaires, comme il en avait l'inflexible courage. Décoré de la croix de guerre, il était cité une première fois en ces termes : « Conduite extrêmement remarquable pendant toute la campagne, à laquelle il a pris part depuis la mobilisation ; a brillamment enlevé sa demi-section à l'assaut du 7 avril."

Il sera de nouveau cité très élogieusement à Verdun. Il allait se développer, dans la carrière, de la façon la plus distinguée. Il n'y avait qu'une difficulté : c'était, avec une si magnifique témérité en face du danger, de pouvoir vivre. En effet, il fut frappé, le 22 novembre 1916, à Barleux, dans la Somme, d'une balle en pleine tête, sur le parapet de sa tranchée. Cette tranchée reçut aussitôt officiellement son nom glorieux. Au moment où il s'affaissait, un prêtre brancardier, professeur au Petit Séminaire de Brive (aujourd'hui à Lacabane, près Terrasson), M. l'abbé Durand, (qui devait être tué un mois plus tard), portant la communion à quelques soldats, arrivait près du mourant. Ce fut providentiel. Il put assister le jeune officier, toujours si fidèle à la religion de ses pères, comme à la religion de l'honneur, ainsi qu'en témoignaient son petit fanion du Sacré-Coeur et sa médaille de Marie. Il mourait, vraiment, en bon chrétien et en bon français.
Trois fois cité, il a reçu la Légion d'honneur, avec ce motif, qui résume tout, son caractère, sa vie, sa mort : Chef de section de grande valeur morale ; le 22 novembre 1916, a été tué glorieusement à la tête de ses hommes devant Barleux.

Et quelques années plus tard, Albéric Valleton de Boissière mit en vente le château et le domaine de Garraube. L'annonce de cette vente fut publiée en 1920 dans le Figaro. Ce fut un haut fonctionnaire parisien, monsieur Charles Laurent qui acheta Garraube et ses descendants en sont toujours propriétaires. Ce très long périple dans le temps et l'espace aurait pu s'intituler :

Les Valleton de Boissière, trois siècles à Garraube,

ou d'un Jean, seigneur de Garraube en 1650 à un autre Jean, héros de la guerre de 1914



@ Marie-France Castang-Coutou
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