Qui était inhumé dans l'église ?

Un enterrement dans l'église correspondait à un privilège en permettant de «reposer plus près de Dieu». Mais une sépulture dans l'église était-elle réservée aux familles nobles? Etait-ce un privilège lié au nom ou à la fonction? Pouvait-on acquérir ce droit ? Le relevé des registres paroissiaux permet de répondre à ces questions.
Prenons l'exemple de l'année 1700 :
on trouve un enfant de la famille POURQUERY, une grande famille présente à Liorac, Guillen ROUDIER, le maréchal ferrant enterré sous le clocher de l'église (ce n'était pas la "meilleure place", mais c'était dans l'église!), Pierre PLAZIAS, un habitant du bourg de Liorac, travailleur de terre, qui fut un temps marguiller et très souvent témoin lors des cérémonies et Thonie CHASSAIGNE, une femme âgée, veuve de Pierre Chassaigne, laboureur à Filolie (cette famille a abrité dans certaines branches un notaire royal et un sergent royal)
† le 04/01/1700, Pierre POURQUERY, 5 ans enterré dans l'église fils de Mathieu POURQUERY sieur de la Bernardye et de Raymonde DE PUYBERTRAND
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† le 29/04/1700, Guillen ROUDIER, 55 enterré sous le clocher du dit Liorac, maréchal-ferrant
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† le 04/06/1700, Pierre PLAZIAS dit Canselin, enterré dans l'église
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† le 13/09/1700, Thonie CHASSAIGNE, 80 ans, décédée au village de Filolie, enterrée dans l'église, veuve de Pierre CHASSAIGNE dit Gounat,de son vivant, laboureur à Filolie

Et puis en 1763 :
on trouve une demoiselle POURQUERY, un enfant JAVERZAT, d'une famille de négociants installés à Mouleydier et deux VALETON, père et fils, sieurs de la Tyssanderie.
À remarquer le nombre impressionnant de curés qui se déplaçaient pour venir participer à l'ensevelissement d'un VALETON et d'une POURQUERY. Souvent d'ailleurs cela relevait de la volonté des défunts, qui avaient réglé dans leur testament les modalités concernant leur enterrement, en précisant le nombre de prêtres qui devaient être présents et en réservant une somme parfois rondelette pour les dédommager...

† le 08/06/1763
Demoiselle Marie POURQUERY, 83 ans, habitante du présent bourg, enterrée dans l'église et tombeaux de sa maison
Présents : Mr LALOUBIE curé de St Martin, Mr GONTIER DE BIRAN curé de St Sauveur, Mr le curé de la Monzie, Mrs les curés de St Cybart, de St Caprais, Mrs les vicaires de la Monzie, de St George, de Liorac et moy, Jacques POURQUERY curé de Liorac.
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† le 27/08/1763
JAVERZAT Pierre, 22 mois enterré dans l'église et tombeaux de ses pères, fils de Pierre JAVERZAT Pierre "negotiant" et de Eléanor MARTY, habitants du lieu de Moleydier paroisse de St Cybart
Présents : Pierre JAVERZAT son grand père "négotiant" à Moleydier, Jean CHASSAGNE du présent bourg, signé: Jacques POURQUERY curé de Liorac
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† le 14/10/1763
Guillaume VALETON, sieur de la Tyssanderie fils,38-39 ans enterré dans l'église et tombeaux de ses père et mère
Ont assisté au convoi : Mr ADRIEN curé de St Caprais, CONSTANTIN curé de St Cybart, GONTIER archiprêtre de St Marcel, TUILLERE curé de Cause, LALOUBIE curé de St Martin, LAMOTHE curé de Crémont, GONTIER curé de St Sauveur, MOREAU vicaire de St George, EYMART prêtre et moy, Jacques POURQUERY curé de Liorac
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† le 12/11/1763
Henry VALETON sieur de la Tyssanderie,67 ans enterré dans l'église et dans les tombeaux
Ont assisté au convoi : Mrs GONTIER archiprêtre de St Marcel, GONTIER curé de Vic, TAVATIN curé de Pressignat, GONTIER curé de St Sauveur, CONSTANTIN curé de ST Cybar, Mr le curé de St Germain, Mr LALOUBIE curé de St Martin, Mr LABORIE curé de Clermont, Mr MOREAU vicaire de St George et moy, Jacques POURQUERY curé de Liorac
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Sur cet exemple très limité, on voit donc que l'église n'était pas strictement réservée aux nobles, même s'ils y avaient leurs tombeaux de famille, souvent placés dans la nef, "à la meilleure place", le plus près possible de l'autel. On trouve également dans l'église des familles plus modestes, mais toutefois suffisament aisées pour pouvoir acheter un emplacement dans les tombeaux gérés par la fabrique. La fabrique était un organisme qui s'occupait des biens matériels de l'église: ainsi lorsqu'une place était libérée, en absence d'héritiers par exemple (puisqu'une place dans l'église faisait partie de l'héritage au même titre qu'un pré ou qu'une habitation), le curé faisait une annonce en chaire à la messe du dimanche et la place était attribuée soit en raison de services rendus à l'église (artisans ayant travaillé à sa réfection, marguiller....) soit en fonction d'un prix payé. La sélection se faisait donc plus par l'argent que par le nom...

Mais ce qui était "bien" pour les défunts, l'était beaucoup moins pour les vivants :
les corps étaient en effet ensevelis à faible profondeur sous le sol de l'église, le plus souvent en terre battue et rarement recouvert de dalles et les fidèles devaient respirer les émanations putrides qui pouvaient propager maladies et épidémies. Le roi Louis XVI interdira cette pratique le 10 mars 1776 pour des raisons de « salubrité de l'air » et à partir de cette date « nulle personne ne pourra être enterrée dans les églises à l'exception des archevêques, évêques, curés». Cette déclaration ne fut enregistrée à la sénéchaussée de Périgueux que le 12 novembre 1778 si bien que l'on a continué à enterrer dans les églises du Périgord jusqu'à la fin de 1778.
Et à Liorac on a continué à enterrer dans l'église au moins jusqu'au 22 Février 1778, date à laquelle Anne VALETON âgée de 20 jours, décédée à la Roque, fut enterrée dans l'église...
Après cette date le curé DU CLUZEAU ne précise plus.

Et puis, pour faire sourire, voici un acte très officiel,

passé devant notaire pour une querelle concernant un "droit de banc" ...

@ Marie-France Castang-Coutou

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