L'école de filles à Liorac :
  de l'école congréganiste à l'école laïque  

LE CONTEXTE : LES LOIS JULES FERRY
"Dans l'esprit des républicains des années 1880, la consolidation du régime politique né en 1875 passe par l'instruction publique. En laïcisant l'école, ils veulent affranchir les consciences de l'emprise de l'Eglise et fortifier la patrie en formant les citoyens, toutes classes confondues, sur les mêmes bancs." (site du Sénat)
Cette réforme de l'enseignement se fit en trois étapes: tout d'abord, établissement d'écoles normales primaires pour former des instituteurs et des institutrices laïcs (1879), puis en 1881, gratuité de l'enseignement primaire dans les écoles publiques et enfin en 1882, obligation pour les enfants des deux sexes, de fréquenter l'école de 6 à 13 ans .
 
A LIORAC
Les populations en milieu rural étaient en général moins bien disposées pour faire éduquer les filles que les garçons, préférant conserver des bras pour assurer les travaux ménagers. Mais dans beaucoup de villages, des religieuses assuraient l'éducation de certaines petites filles, leur enseignant le cathéchisme, la lecture, l'écriture et la couture. C'était le cas à Liorac. En effet, depuis 1880, il existait une école de filles à Liorac. C'était une école congréganiste tenue par les Soeurs du Sacré Coeur de Jésus, dont la maison mère se trouvait à Privas en Ardèche. Cette école était abritée dans une maison appartenant au curé de Nontron (Lavergne) qui l'avait mise à disposition pour cet usage. La soeur VIGNAL la dirigeait. Mais cette soeur mourut en 1894, à 32 ans.
Le 13 juin 1894, à huit heures du matin, acte de décès de Marie Vignal âgée de trente deux ans, née à Laroque Gageac, institutrice publique de Liorac, où elle était domiciliée, fille de feu jean Vignal et de Jeanne Armagnac, décédée au chef lieu de Liorac.
Le sous-Préfet y vit là l'occasion d'ouvrir une école laïque de filles à Liorac ! et dès le lendemain de la mort de la soeur Vignal, il proposa au Préfet à la fois une institutrice laïque et un local pour l'école de filles :
Marie Fontayne : sa formation correspond à ce que préconise la loi puisqu'elle sort de l'école normale et qu'elle est titulaire du brevet et qui, de plus, sera bien acceptée puisque sa famille est connue et que son père est lui même instituteur à Liorac.
le sous-Préfet propose d'utiliser comme local pour l'école de filles le logement de l'instituteur qui n'est pas occupé, solution qui ne coûtera rien à la commune.
Donc, que des avantages à cette proposition !

14 juin 1894

Lettre du Sous-Préfet de Bergerac
au Préfet

(AD24, série T)
  Monsieur le Préfet, l'institutrice congréganiste qui dirigeait l'école communale des filles de Liorac, Mme Soeur Vignal est décédée avant hier. J'ai l'honneur de vous proposer pour la remplacer Melle Fontayne fille de l'instituteur de Liorac, qui occupe actuellement un emploi de stagiaire à Siorac de Belvès. Cette institutrice est une ancienne élève de l'école normale et est pourvue du brevet supérieur. Elle ne possède pas encore, il est vrai, le certificat d'aptitude pédagogique mais elle pourrait, conformément à de nombreux précédents exercer à titre provisoire.
Ce choix offrirait l'avantage d'assurer sans difficulté l'ouverture immédiate d'une école laïque. La commune ne possède pas en effet ni comme propriétaire, ni comme locataire de local scolaire pour les filles. L'école que dirigeait Soeur Vignal était située dans une maison appartenant à Mr le curé de la ville de Nontron. Ce dernier avait prêté ce local à la commune à la condition que l'école serait dirigée par des Soeurs et il est à supposer que cette conditions serait maintenue. Le père de Melle Fontayne qui est propriétaire à Liorac habitant une maison qui lui appartient, le logement destiné à l'instituteur dans l'école de garçons est par suite libre. Une partie de ce logement pourrait donc être dès maintenant affectée à la tenue de l'école laïque de filles. L'école pourrait ainsi fonctionner immédiatement sans qu'il soit besoin d'attendre soit la construction d'un local spécial, soit l'issue de pourparlers toujours longs qui pourraient être engagés en vue d'une location et, les sympathies que possède dans le pays la famille de Melle Fontayne aidant, le résultat serait que nous pourrions ainsi très probablement éviter l'ouverture d'une école privée. C'est en raison de ces considérations spéciales que je prends la liberté, Monsieur le Préfet, de recommander tout particulièrement à votre bienveillante attention la candidature de Melle Fontayne. Si vous pensez que ce choix puisse être fait je vous prierai de vouloir bien hâter votre décision. Veuillez agréer, Monsieur le Préfet, l'hommage de mon respect.
Le sous-Préfet.
 
Le 23 juin 1894 , l'inspecteur d'Académie informe par lettre le Préfet de la nomination de Melle FONTAYNE, stagiaire à Siorac de Belvès, en tant que stagiaire à Liorac chargée de la direction de l'Ecole de filles, en remplacement de Melle Vignal congréganiste décédée.

Institutrice à Liorac, Marie Fontayne épousera le 20 décembre 1898 Jean Dussolier, alors instituteur à Flaugeac. Au moment de ce mariage, Jean Fontayne, le père de Marie, était alors instituteur retraité. En 1899, ils eurent un fils : son père était instituteur public, sa mère institutrice publique, son grand père Jean Fontayne instituteur retraité et Joseph Fontayne, son oncle, instituteur public, momentanément domicilié dans sa famille à Lamartigne. L'histoire ne dit pas si le petit garçon a embrassé la même carrière....